A chacun son sommet

A chacun son sommet

Chroniques de LA PISTE DES OASIS 09 : Partie I

     

 

La Piste des Oasis - Anti-Atlas - 20 au 27 mars 2009

Trail de 100 km en 4 étapes 

J+2. Quelques notes dans un carnet, des impressions, des souvenirs, des instantanés, des images… de cette semaine dans le Sud-Marocain, pendant laquelle j'ai pris un immense plaisir à partager ma passion des sports nature avec huit jeunes handicapés, 34 coureurs, 3 accompagnatrices, un caméraman, un médecin et une infirmière. Présentation du projet ici. 

PARTIE I

Chronique 1. Marrakech sous les eaux

 

Que le temps passe vite. Ce projet de la Piste des Oasis, tant préparé, tant souhaité… arrive déjà. Accueilli la veille par Fred et Katia, me voilà à l'aéroport d'Orly. Nous retrouvons toute l'équipe des Dunes d'Espoir. La joie de revoir des visages familiers et d'échanger. Le plaisir de rencontrer des « Duneurs » venus des quatre coins de la France. La promesse d'une expérience riche pour tous. Les enfants et leurs familles sont là. Je les connais tous, puisque nous avions eu l'occasion de les rencontrer au mois de Février. Je suis un des quatre référents de Sébastien et c'est avec beaucoup d'émotion que je le retrouve avec ses parents et un de ses petits frères. Il me reconnaît et semble bien en confiance. Son père est d'un calme sidérant, sa maman semble montée sur ressorts. Le petit frère prendrait bien une place dans un des bagages.

 

La logistique des Dunes d'Espoir est impressionnante. Les joëlettes, les sacs, le matériel médical... c'est un sacré voyage qui s'annonce. Et je mesure l'ampleur du travail nécessaire à un tel projet. Cela fait plus de 18 mois que le Bureau de l'Association s'atèle à la mise en œuvre de cette aventure. Et je suis heureux et fier d'en être, même si je me sens encore un peu jeunot dans l'histoire des Dunes. Mais c'est ce qui est agréable dans cet univers. Du moment que tu t'impliques, très vite, tu es assimilé et intégré. Le temps défile. Nous enregistrons les bagages. Les parents de Sébastien font des adieux pour revenir à chaque fois. Du coup, Sébastien est complètement perdu et fait des crises de larmes. Avec Fred (son référent principal), nous en sommes désolés et - sincèrement - je commence un peu à m'inquiéter … comment va se passer ce séjour ? Des inquiétudes qui vont bien vite se dissiper. Mais je comprends bien l'attitude de la maman : laisser son fils à des (presque) inconnus, pour un voyage à l'étranger, pendant une semaine… Mais justement, c'est cela l'intérêt d'un tel projet. 

 

 

Nous embarquons dans le vol TO 3016 de la Compagnie Transavia. Tout s'accélère et bientôt, nous prenons les airs. Nous voilà en bordure de l'Océan Atlantique, les côtes sont familières. La chaîne des Pyrénées, l'Espagne, le Détroit de Gibraltar… puis le continent africain. Rabat, la capitale du Maroc… et nous approchons de Marrakech. Des orages perturbent le plan de vol et nous avons droit à quelques tours dans le ciel avant d'atterrir. L'avion se pose sans problème, tout va bien. La troupe se met en mouvement et rapidement, nous rejoignons l'aéroport pour les formalités administratives. Contrôle des passeports, retrait de dirans… puis sortie épique de l'aéroport.

C'est un vrai déluge qui nous accueille, des trombes d'eau. Le transfert vers l'hôtel est hasardeux. Une entrée en matière qui n'altère en rien l'enthousiasme général. Il fait nuit. Nous voilà à l'Hôtel Oudaya de Marrakech. Chacun prend possession de ses quartiers. Puis nous allons tous dîner. Les jeunes sont lumineux. Cette première soirée en terres marocaines se conclue et bien vite, me voilà dans les bras de Morphée. 

Contrôle des passeports, retrait de dirans… puis sortie épique de l'aéroport. C'est un vrai déluge qui nous accueille, des trombes d'eau. Le transfert vers l'hôtel est hasardeux. Une entrée en matière qui n'altère en rien l'enthousiasme général. Il fait nuit. Nous voilà à l'Hôtel Oudaya de Marrakech. Chacun prend possession de ses quartiers. Puis nous allons tous dîner. Les jeunes sont lumineux. Cette première soirée en terres marocaines se conclue et bien vite, me voilà dans les bras de Morphée.

 

Chronique 2. Dessine moi un Pays

Réveil matinal. C'est l'appel de la prière du Muezzin du haut du Minaret pour lancer son Allah Akbar. J'ai pas vraiment bien dormi, faute à un compagnon de chambrée malade, qui a ronflé toute la nuit. Mais je suis d'humeur joyeuse, la journée s'annonce heureuse pour tous. Rapidement, c'est le petit déj. Une grande partie de la troupe est déjà là. Je retrouve Sébastien. Il a passé la nuit avec Serge et Christian « c'est quand qu'on court ? ». Un bon petit déjeuner qui fera du bien à tous.

 

 

 

Ensuite, tout le monde prépare ses bagages et c'est le début de l'expédition. Nous rencontrons Hassan, le chauffeur de notre 4x4. Hassan est un homme jovial, souriant et qui transpire de gentillesse. Qu'il soit remercié pour tout ce qu'il a fait pendant notre séjour et sa grande disponibilité envers Sébastien. Chacun s'active pour installer les jeunes dans les véhicules, charger les bagages et les joëlettes… Et nous sommes bien vite prêts… pour attendre. Car dans ce Pays, le temps prend vite une autre signification. Et il faut laisser le temps au temps… et donc, prendre le temps. J'avoue ne pas y être habituer… et cette inertie sera la seule source de frustration pour nombre d'entre nous.

La vingtaine de 4x4 se met en mouvement en direction de Tarroudant, le camp de base de notre première journée. En quelques kilomètres, le dépaysement est total. Ici, tout invite à la découverte et à l'évasion. Le dernier modèle de 4x4 côtoie la mobylette d'un autre âge, les ânes, les constructions inachevées… Nous faisons un premier arrêt sur la route pour prendre un thé à la menthe, LA boisson du Pays. Je découvre la richesse de cette terre généreuse. Et surtout, je suis marqué par les sourires. C'est un ravissement. Ici, les gens sourient. Je me fais plaisir à prendre des photos des fleurs, des lanternes, des objets… A tel point que miss Anna se fout de moi... avec son humour habituel. Qu'importe, ici, c'est un havre de paix, un pays de rêves, où tout incite à la détente et au repos. 

Nous poursuivons notre périple pour rejoindre le site de notre pique nique. Et quel repas. Petits gâteaux, poulet mariné, crudités… c'est un régal. Nous faisons une belle ballade parmi les arganiers. Les jeunes sont heureux et leur bonheur irradie leurs visages. Puis encore deux heures de trajet et nous nous installons au Palais Salam, à Tarroudant. Un merveilleux endroit. Là, il n'y a plus de doute, nous sommes dans l'aventure. Point de baobabs, mais des palmiers. Point de rose, mais des bougainvillées. Le Petit Prince de St Ex aurait été ravi. Et nos princes et princesses de ce séjour le sont. Bienvenu au Pays des Merveilles, sur les Pistes Marocaines. Cet Hôtel est digne d'un Palais (ce qu'il fut, semble t-il). Jardins, coursives, suites… magnifique.

 

 

 

Une fois que chacun est bien installé, que les joëlettes sont montées, nous nous retrouvons tous pour le contrôle du matériel, la remise des dossards… et le briefing général. Car, on ne l'a pas oublié, nous sommes là pour participer à une épreuve sportive. Un trail en 4 étapes, de 100 km. Sur le papier, cela ressemble plus à un bon treck, tant le road book est rudimentaire. Mais la suite nous prouvera bien vite qu'il n'en est rien. Nous dînons tous ensemble. Je continue mon reportage photos. Le chef prête son couvre chef à Sébastien. Eva jubile. Prescilia rigole. Nuvan commente sa vision du Pays. Nous commençons à échanger avec les autres participants de l'épreuve. La soirée se prolonge par une ballade dans Tarroudant. Et toujours ces sourires, cette gentillesse, cette prévenance. Une belle nuit au Palais et nous serons d'attaque pour la première étape.   

Chronique 3. Quand c'est plat, c'est moins pentu

6h00. Réveil de la tribu des Dunes d'Espoir. « Les coureurs en jaunes » ont des codes, des mœurs et des habitudes spécifiques, qu'il faut connaître à l'avance, sinon, on est surpris. D'abord, ils se lèvent tôt, pour s'habiller en jaune. Ensuite, ils rangent au placard la mauvaise humeur, le chagrin, les soupirs, les yakafokon… pour ne connaître que les sourires, l'apaisement, la solidarité, le goût de l'effort, l'entraide et la joie. Une fois qu'on sait cela, l'apitoiement et la condescendance n'ont point leur place. Car un « duneur » , ça s'apprivoise. Ici, les coureurs sont là pour les enfants. Pour leur bonheur, pour leur plaisir, pour leur épanouissement. C'est la règle d'or. Les enfants ne sont pas là comme faire valoir des coureurs. Pour moi, c'est important de le dire, car c'est ma ligne de conduite dans mon engagement au sein de Dunes d'Espoir.

 

 

Mais revenons au début… Après une nuit digne des contes merveilleux, chacun a soif de grands espaces, de sensations… et sera servi. Le voyage pour rejoindre Irhem, point de départ de l'étape, est pour Sébastien un vrai ticket pour la fête, avec la complicité de tout l'équipage. Des wouah ponctuent chaque virage sur ces pistes de 4x4.

 

A 11h00, c'est le top départ pour tous. Les 4 joëlettes s'élancent avec enthousiasme. Les jeunes sont heureux. Le paysage est superbe. Audrey fut notre première passagère. Sur la première section du parcours, très roulante, nous traversons des champs de fleurs et de cactées, des villages, des plantations. C'est absolument grandiose. Des marocains nous accompagnent, nous encouragent. C'est grisant, énergisant. Audrey a la banane, elle est heureuse, lumineuse.

Nous sommes huit coureurs sur cette joëlette. André, Odile, Nanou, Laurent, Eric, Alain, Valéry et moi-même. J'en profite pour les remercier pour leur état d'esprit. Je n'aime pas passer mon temps à écrire des compliments, tant c'est galvaudé en ces temps. Mais simplement, je tiens à vous dire que vous illustrez parfaitement la signification que j'accorde au mot « altruiste » : la propension désintéressée à se consacrer et à aimer les autres. Pendant tout le raid, nous avons été unis. Dans l'effort et la joie, pour savourer chaque instant de cette aventure et la faire partager à nos jeunes passagers.

 

 

 

Nous n'avons pas beaucoup couru sur cette étape… qui en surprendra plus d'un par sa difficulté. Les senteurs, les couleurs, tout invite au voyage. Les femmes portent des vêtements d'un bleu miraculeux, un bleu d'iris, un bleu royal. Au relais, Gwendal trône désormais dans la joëlette. Gwendal était impatient d'être notre passager… pour un périple qui va nous conduire dans un canyon. Un circuit très engagé et aérien. Beaucoup de rochers et de pierriers. Beaucoup de chocs répétitifs. Une expérience dont tout le monde se souviendra. Dans de telles conditions, l'esprit d'équipe qui unit les enfants et les coureurs est à son maximum. Sur cette première étape, superbe à tous points de vue, l'esprit Dunes va être mis à rude épreuve. Le Canyon de Tamgoute est un site absolument superbe, mais qui va réserver, dans sa seconde partie, des difficultés trop importantes.

J'ai pris un plaisir jouissif pendant cette étape. Mais, je le pense sincèrement, pas les jeunes (enfin pas tous). Trop difficile, trop engagé, trop excessif. Les Dunes d'Espoir passent partout, c'est clair. Mais les jeunes doivent prendre du plaisir, et là, comme le dira Nuvan « j'étais impatient que cela se termine ». 

 

Au niveau du village, certains habitants nous aident, nous guident. L'harmonie règne au sein de la joëlette. Et pourtant, c'est dur. La traversée d'une oasis nous conduit vers la ligne d'arrivée, après plus de 5 heures d'effort. Nous sommes accueillis comme des champions. Nous échangeons avec les autres coureurs de la Piste des Oasis et profitons des mets à notre disposition. Cette première étape fut un épisode d'anthologie… que réservera la suite ? 

 

Chronique 4. Dans l'Oasis, il n'y a rien, mais tu ne manques de rien

La nuit au Relais des Sables de Tata est récupératrice pour tous. Et le tajine était vraiment succulent. Aujourd'hui, l'étape est « facile » d'après l'organisateur, Gilbert. Je participe au briefing (sommaire) de la journée. L'étape de la veille en a refroidi plus d'un. Même les coureurs « hors » Dunes d'Espoir ont été surpris par sa difficulté. Donc, j'écoute avec prudence les mots de Gilbert. Lorsqu'il annonce « un faible dénivelé » et « peu de difficultés », ses propos provoquent l'hilarité de tous. 

 

 

 

Les minutes s'égrènent et nous n'avons pas encore pris la direction du site de départ. Du coup, Hassan monte le volume de l'autoradio. Et au son de la musique berbère, il danse avec les enfants. Sébastien, Audrey et Nuvan sont aux anges. Nous partons ensuite pour Akka dans la province de Tata, où nous sommes reçus divinement. Les habitants, les autorités… sont réunis pour participer à la fête. Petits gâteaux, thé, discours, chacun est aux petits soins. La tenue de cette épreuve a une signification toute particulière. L'organisateur a eu la merveilleuse idée d'associer une vingtaine de coureurs locaux à cette étape. C'est génial.

 

Aujourd'hui, nos passagers se prénomment Nuvan et JB (Jean-Bernard). Le départ est donné (comme d'habitude) tard. En plein cagnard. La première partie se déroule essentiellement dans une palmeraie. Nous allons découvrir tous les aspects de la vie dans un tel site, ses jardins (palmiers dattiers, orangers, lauriers roses...), ses parcelles de cultures (orge et blé), ses animaux (chèvres, ânes...), ses maisonnettes en terre séchée... Beaucoup d'enfants nous accompagnent en courant, à vélo… c'est grisant. L'allure est extrêmement rapide. Très vite, Valéry calme le jeu… pour que chacun se fasse plaisir. La règle est simple. Tout le monde doit être en mesure de prendre son relais. Ici, point de chrono, point de compétition. Tout fonctionne à merveille. Je prends pas mal de photos. Alain également. Nuvan a une caméra embarquée et filme donc de nombreux moments. 

  

Des murets en boue séchée jalonnent le parcours. Cela ressemble à un gigantesque labyrinthe. La Kasbah d'Akka est superbe. Une banderole nous accueille. Des « bonjours » font échos à nos salutations, des sourires toujours, des petites tapes dans les mains. C'est clair, nous sommes l'attraction du jour. Et les habitants de cette oasis nous offrent un merveilleux cadeau : leur humanité. Nuvan est radieux, il commente les paysages, questionne, s'intéresse. Nous avons un vrai échange, enrichissant. Nous nous arrêtons pour discuter avec des enfants qui sortent juste de l'école. Quelques mètres et c'est le ravito dans un cadre somptueux. Nous sommes accueillis par une multitude d'enfants. Nous retrouvons la joëlette de Sébastien. Ce sont des enfants qui la pilotent. C'est particulièrement émouvant. Sébastien rigole et encourage à tout va.

 

 

Bientôt le relais. Nous retrouvons Katia, Nadette et Cécilia, les accompagnatrices. Toujours attentives et aux petits soins. Jean-Bernard poursuit l'aventure avec nous. Jean-Bernard est un jeune adulte. Il est très lucide sur son handicap. Sur ce qu'il sait faire, et ne sait pas faire. Il n'a donc pas l'innocence des enfants. Et sait prendre du recul et relativise beaucoup de choses. Mais il connait également les vagues à l'âme et la mélancolie. Nous allons fouler ensemble le fech fech de sable fin. Le paysage a radicalement changé. Nous sommes désormais dans le désert. De grandes étendues, des Dunes fossiles, de grands espaces.

C'est vraiment grandiose. On rigole avec Poussinette (Odile). L'ambiance est toujours aussi sympa. Nous avons deux joëlettes en ligne de mire. Grâce à ce jaune fluo (merci Jean-Marc), on se repère vraiment bien. C'est clair, il n'y a aucun risque de se perdre!!! La boussole va faire la grève (je sais depuis l'aéroport que la grève existe - aussi - dans ce Pays). Les kilomètres s'égrènent. Des coureurs viennent nous encourager. Il reste 800 m à parcourir. C'est bientôt (déjà) la fin. Que cette étape a semblé facile. Jean-Bernard passe la ligne en marchant. Il est ému. Les lunettes de soleil sont bien utiles en ces moments… et pas que pour les rayons du roi. 

 

Tout le monde nous encourage. La dernière joëlette franchit la ligne. Nous nous restaurons tous autour d'un bon pique nique. Puis nous allons dans une gorge, dans cette ancienne oasis. Nous en profitons pour nous baigner. C'est vraiment surprenant de trouver un tel site après les contrées désertiques que nous venons de traverser. Tous les enfants sont heureux et ne montrent aucun signe de fatigue ou de lassitude. Pourtant, ces journées ont été bien chargées. Angélique (l'infirmière) et Eric (le médecin) exercent leurs talents auprès des coureurs, qu'ils soient de Dunes d'Espoir ou pas d'ailleurs (le médecin officiel ayant préféré la farniente de l'oasis. No comment).

 

Nous nous retrouvons tous à Akka pour la remise des prix. Une sympathique cérémonie, pendant laquelle j'aurai plaisir à discuter avec le jeune vainqueur de l'étape, Brahim, et Rkia, sa copine d'entraînement (14 au scratch). Un échange très intéressant et enrichissant. Ces jeunes font preuve d'une grande maturité. Puis, tout le monde rejoint le Relais des Sables, halte pour ce soir.                                                                    

A LIRE  : Partie II (Chroniques 5 - 8), la suite des aventures marocaines des Dunes d'Espoir



29/03/2009
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