SWISS IRON TRAIL 2012 : La Grenouille et le Bœuf

Le canton des Grisons, le Massif de la Bernina, la haute-montagne, les bouquetins et les lacs… tel était le cadre de la première édition du Swiss Iron Trail. L’objectif de Tuffli Events (à l’origine du Swiss Alpine Marathon) était d’établir un nouvel ultra-trail en une seule étape dans les Alpes Suisses pour « aller au-delà des limites ». Cette nouvelle épreuve de longue endurance a tourné court. Un vrai fiasco même. J’en ai été acteur et témoin pour ma plus grande déception. Pourtant, le concept avait de quoi faire rêver. 200 km entre Pontresina et Coire, avec des passages à plus de 3000 m d’altitude, des panoramas à couper le souffle, le franchissement du glacier Morteratsch, des sommets. Bref, pour un traileur-montagnard comme moi, l’aventure s’annonçait belle et intense. Trop belle ? Peut-être. J’ai fait une confiance aveugle à l’organisation « Swiss Made ». Mes multiples participations à la mythique course de Sierre-Zinal m'avaient conforté dans ce choix de participer à cet ultra, connaissant le sérieux des Suisses. Mais voilà, le Swiss Iron Trail s’est inscrit dans une recherche de notoriété internationale et de succès commercial. Tout semble avoir été mis sur la communication et le marketing, en sous estimant l'environnement de la haute montagne. 4 distances (T201, T141, T71, T21) dès cette première édition. Le but officiel et affirmé de Tuffli Events était même d’atteindre les 4000 participants en cinq ans.

Départ de Pontresina - Canton des Grisons

Val Roseg

Une chose de certaine, j'y ne serai pas en 2013. Les conditions météorologiques sont avancées comme facteur de l’arrêt prématuré de la course, 7h à peine après son lancement. Il ne faut pas se méprendre. Le mauvais temps était annoncé pour la journée et une partie de la nuit. Le départ initialement prévu à 8h du matin a été décalé à 16h au dernier moment. Nous nous sommes languis à attendre une information par sms. Les organisateurs ont longuement tergiversé. Ils nous ont finalement envoyé dans les montagnes. L’unique but était de faire partir l’épreuve, réduite à 154 km, pour pouvoir se justifier du report. Nous avons parcouru une cinquantaine de kilomètres entre Pontresina et Bergün. Le passage au Fuorcla Surlej était superbe. La découverte de la clinquante ville de St Moritz. La pluie a commencé et s'est intensifiée. Arrivés au Piz Nair à 3022 m d’altitude, nous avons été neutralisés 30 mn dans le téléphérique. En sortant, je m'attendais à un déluge. Il n'en fut rien. Puis l’annonce soudaine de l’arrêt définitif de la course après Fuorcla Crap Alv. Le coup de massue. Il ne faisait pas un froid intense. Ni neige, ni vent. Nous avions juste une pluie continue. A Bergün, l'organisation flotte complètement. C'est consternant et navrant. A 3h30 du matin, nous voilà dans le Bus Postal qui nous ramène à Coire. Fin du Swiss Iron Trail. Le temps s'est déjà amélioré et cela se confirmera par la suite. Un vrai gâchis.

Col de Fuorcla Surlej

Le Lac de Fuorcla Surlej

Au final, j’ai récupéré tous mes sacs d’assistance dans des circonstances ubuesques. Je n’ai même pas utilisé mon sur-pantalon Gore-Tex (équipement obligatoire). L'organisation s'est empressée d'effacer toute trace de l'épreuve. Malgré tout, je suis resté sur Coire trois jours. J’ai profité du beau temps pour me reposer. Mon ultra-trail s’est transformé en ultra-sieste. Certains sont compréhensifs quant à la gestion de Tuffli Events. D’autres pas. Moi, je n’ai jamais vu une organisation d'un tel amateurisme. A l’image d’un balisage qui n’est même pas réfléchissant la nuit. Un comble pour un ultra-trail en montagne avec un temps limite de 56h. Le Swiss Iron Trail voulait proposer un vrai voyage au cœur des montagnes et de la nature, s'adressant à des traileurs expérimentés et aguérris. Devenir une référence de l'ultra en montagne, à l’image de l’Ultra-Trail du Mont Blanc, considéré (à tort selon moi), comme le must absolu de la discipline.Tuffli Events ferait bien de s’inspirer de l’expérience de Cims Magics (Ultra-Trail d'Andorre) ou de VDA Trailers (Gran Trail Valdigne, Tor des Géants), qui sont exemplaires en termes d’organisation et d'anticipation, de respect de tous les participants et bénévoles, d’amour de la montagne et de gestion du risque. Et ce, malgré les conditions parfois difficiles de la haute montagne. Bref, le Swiss Iron Trail, c’est la fable de la Grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le Bœuf.