A chacun son sommet

A chacun son sommet

MARATHON DU MONTCALM 2011 : un bien beau Caillou

 

Le « Caillou », du haut de ses 3077 m, domine la Vallée d’Auzat et du Vicdessos en Haute-Ariège. Et de ce Montcalm, les habitants en sont fiers, à l’image de Bernard Piquemal, jovial Maire d’Auzat et Responsable de l’organisation de cette 22ème édition du Challenge des 3000 Ariégeois. Cette épreuve est historique dans les Pyrénées et est pour une moi une référence, dans la mesure où elle concentre tout ce que je recherche dans ma pratique sportive : l’engagement, la technicité, le dépassement… tout en ne perdant jamais de vue mon objectif ultime : se faire plaisir.

 

 

 

Le Marathon du Montcalm propose un parcours exemplaire en ce sens qu’il nous fait partir du bas de la Vallée, au cœur du charmant village d’Auzat, 737 m au dessus de la mer, pour fouler les cimes ariégeoise et catalane que sont le Pic du Montcalm (3077 m) et la Pique d’Estats (3143 m). Ainsi, tous les aspects de la montagne sont offerts aux participants : les sous-bois, les alpages, les pierriers, les sommets… tout en pouvant admirer une flore abondante, des lacs, des torrents et des cascades.


Qui plus est, cette édition 2011 est une étape des World Series Trials et sert de support à la première édition du Championnat de France de Skyrunning. Porté par la toute jeune Association Française de Skyrunning, représentée par son Président, Marc Villa, et sa Vice-Présidente, Corinne Favre, ce Championnat se veut avant tout un vecteur de reconnaissance du skyrunning en France. 

 

 

Une épreuve de haut niveau

 

Avec plus de 300 inscrits au Marathon du Montcalm, 2011 marque un record de participation pour cette épreuve. Et c’est amplement mérité vu le professionnalisme de cette organisation. Tout est mis en œuvre pour que chacun profite de sa participation au Challenge des 3000 ariégeois en découvrant toutes les facettes de cette belle région dédiée à la pratique des sports nature.

 

L’aura de l’épreuve, associée au Championnat de France de Skyrunning et le soutien de la Fédération Internationale de Skyrunning, a attiré un plateau relevé de coureuses et de coureurs venus de nombreuses régions, et bien sûr, d’autres pays comme l’Angleterre, l’Ukraine, la Pologne… et bien sûr l’Espagne, l’Andorre et l’Italie, terres de prédilection du skyrunning et de la course de montagne.

 

Me concernant, il s’agit de mon deuxième marathon de montagne pour cette année, après ma participation à Zegama-Aizkorri au Pays Basque Espagnol avec Niko et Fifi (mon reportage). Ces 3000 ariégeois viennent clôturer une semaine de haute montagne passée à gravir de beaux sommets pyrénéens : le Pic du Midi d’Ossau et le Pic du Balaïtous. Je suis là pour m’enivrer des montagnes ! 

 

 

La soif du dépassement 

 

42,5 km et 2580 m de dénivelé positif, voilà en quelques chiffres le pédigré de ce Marathon du Montcalm. A 7h00 heures précises, Bernard donne le départ. Bien vite, nous voilà à parcourir les rues d’Auzat en direction du fond de la Vallée… et du Montcalm. Les premiers kilomètres sur la route permettent déjà de bien s’échauffer. Je parts en compagnie de Corinne Favre.

 

Au bout d’une vingtaine de minutes, place à un beau sentier. Et nous n’aurons plus de bitume… jusqu’au retour dans la Vallée aux alentours de midi. Le temps est radieux, il est annoncé des températures assez élevées. Du coup, j’ai mis la casquette pour ne pas prendre un coup de chaud. Nous cheminons parmi les buis. L’odeur est très agréable. Ça monte tranquillement pour rejoindre un aqueduc à la côte 1170. 5 km de fait ! Et désormais, c’est du tout plat pendant 4 km ! Un comble en montagne.

 

Je me laisse doubler par des boulets de canons… qui semblent être partis pour un marathon… sur route ! A croire qu’ils sont soit très forts, soit qu’ils ont un peu oublié que bientôt, ça va monter sévère ! Finalement, je les « ramasserai » un peu plus tard, dès les premières montées. Et déjà, ils semblent avoir surestimé leurs capacités. 

 

 

La course de côte 

 

Passé Lartigue au km 10, c’est désormais du pentu. Il s’agit de bien gérer cette montée de près de 1900 m pour atteindre le Sommet du Montcalm. Je me sens plutôt bien. Toute la portion en forêt est magnifique, avec ses beaux sentiers qui serpentent. Le Marathon du Montcalm est pourvu de plus d’une quinzaine de ravitaillements, pourtant, j’ai fait le choix de partir avec un camelbag pour être autonome en eau.

 

A la sortie de la forêt, je remonte sur Marc (Villa) et on s’encourage mutuellement. Passage à l’Orrys de Pla Nouzère au km 13,1 à 1680 m d’altitude. Les encouragements sont toujours aussi nombreux. Nous remontons des randonneurs partis à 5h00 du matin. Après avoir longé le beau lac Sourd, il s’agit d’atteindre désormais le Refuge du Pinet à 2240 m. Et là, le soleil commence à taper fort !

 

Au refuge, pratiquement 16 km de fait… et c’est désormais un univers exclusivement minéral qui s’offre au regard et à notre pas. Du rocher, du caillou, des pierres. Ceux qui n’aiment pas vont apprécier. La Pique d’Estats est droit devant. Le Montcalm un peu plus à gauche. C’est vraiment de la course de côte, en pleine montagne. 

 

 

L’ivresse des cimes 

 

Passage à l’étang du Montcalm au km 18. Il reste 600 m pour atteindre le « caillou ». Bientôt, une fusée dévale la caillasse. C’est Michel Rabat qui entreprend déjà la descente. Il est impressionnant. 6 mn plus tard arrive son poursuivant, Julien Cougnaud, suivi de près par le troisième (et tenant du titre), le catalan Javier Rodriguez Bodas. Les positions resteront ainsi et ce sera le podium final de l’épreuve

 

De mon côté, je ne m’emballe pas. Je poursuis ma progression sur un bon rythme. L’ivresse des cimes… c’est toujours un peu dangereux. Gare à ne pas se griller en montant. Je suis convaincu que la montée est toujours beaucoup plus facile que la descente. Et comme j’aime bien les deux, je préfère garder du jus pour, encore une fois, profiter pleinement de ce magnifique parcours et me faire plaisir.

 

Me voilà au col à 2900 m d’altitude. Je prends à gauche, direction le Montcalm. De la droite, plusieurs concurrents de tête sont déjà sur le retour. Quelques lacets pentus conduisent au Montcalm. Marc me remonte. Il est plutôt en forme. Michel Arnaud, le très sympa organisateur des Trails des Citadelles revient du Montcalm. Il me précède de quelques minutes à ce sommet, que j’atteints bien vite. 

 

 

Le temps suspendu

 

Montcalm, 3077 m. Il y a pas mal de monde à ce Sommet. Très beau panorama sur les montagnes environnantes, bien dégagées. Les contrôleurs pointent les dossards. Je prends mon temps pour profiter de l’instant… puis j’entreprends la descente. Direction désormais la Pique d’Estats. D’un sommet ariégeois à un sommet catalan ! Les traileurs – skyrunners sont des passeurs de frontières !

 

Me voilà de nouveau avec Marc et je lui dis combien je me régale. Il savoure également. Tous ces passages à flanc des cimes, ces crêtes aux abords des à-pics… j’adore. J’en voudrai encore plus. C’est la justification même de ma pratique de l’alpinisme et de la haute montagne. J’aime venir côtoyer le vide. J’aime jouer à l’équilibriste. J’aime me sentir en haut des montagnes.

 

La Pique d’Estats se rapproche bien vite. Encore quelques mètres… et à 3143 m, je peux contempler, juste en face de moi, le Montcalm, que j’ai quitté il y a encore peu de temps. De part notre aisance sur le rocher, nous pouvons courir là où d’autres doivent marcher. Nous accentuons donc ce sentiment de « courir sur le ciel », la signification même du skyrunning. 

 

 

 Une descente de haute volée 

 

Place désormais à la descente. Là, il convient de trouver, tel un chef de cuisine, la bonne recette pour profiter pleinement de l’environnement, ne pas prendre des risques inutiles, mais aussi ne pas perdre de temps. Car comme je le disais précédemment… descendre, c’est plus difficile que de monter. Plus usant pour l’organisme. Plus usant pour le mental.

 

Il faut savoir bien contrôler sa foulée. Il faut bien poser son pied, sur la bonne pierre… au risque de chuter. Il faut savoir lire le terrain de la montagne. Et ça, j’adore. Lors de cette descente, on croise toutes celles et tous ceux qui montent. On s’encourage. Je reviens assez vite sur Michel des Citadelles, qui gère prudemment son retour. Faut dire qu’il a encore le Tour de l’Aneto dans les jambes !

 

Col 2900, c’est le km 23. Il reste donc 20 km pour rejoindre Auzat et je suis vraiment bien. Le Refuge du Pinet est bien vite atteint, puis c’est l’Orrys de Pla Nouzère. Je remonte quelques participants. La chaleur commence à vraiment s’installer. A un ruisseau, j’en profite pour mouiller la casquette. Et toujours de nombreux encouragements tout le long du parcours. 

 

 

Un final champêtre

 

La Chapelle de Marc marque le km 36. Nous allons ensuite emprunter le Pont de Gers, pour ensuite cheminer à flanc de la Vallée. Un très agréable sentier qui permet de découvrir quelques hameaux abandonnés. Et toujours cette agréable odeur de buis. Il fallait en garder sous le pied pour ces derniers kilomètres. Très roulants… mais réservant aussi quelques petites « bosses » comme l’avait dit malicieusement Bernard lors du briefing de la course.

 

Bientôt je reconnais la foulée de Corine. Rapidement, je me mets à son niveau et nous discutons un peu. Corinne souffre des genoux et n’a pas pu suivre le rythme de Stéphanie Jimenez dans la descente. Du coup, elle gère avec sa bonhommie habituelle. On se souhaite une bonne fin de course et je reprends mon allure. Bientôt l’usine d’eau du Montcalm et le centre équestre.

 

Restent 2 km pour rejoindre le centre d’Auzat. Je suis étonnamment bien. Cela me surprend même. Mon corps assimile parfaitement toutes ces dernières sorties en montagne. Je rentre dans une petite ruelle et bientôt, je franchis la ligne d’arrivée en 5h35, soit plus d’une heure après le premier Champion de France de Skyrunning, Michel Rabat, et 25 mn après la première Championne de France de Skyrunning, Stéphanie Jimenez. 

 

 

L’envie d’avoir envie 

 

De cette participation au Challenge des 3000 Ariégeois, je garderai à l’esprit la générosité des habitants de toute une Vallée. De leur enthousiasme, de leur refus du renoncement. Avoir l’envie, c’est important de nos jours. Et c’est ce qui manque à beaucoup. Les usurpateurs, les fatalistes, les bonimenteurs sont monnaies courantes. C’est toujours plus facile de trouver des excuses, que d’accepter une réalité, de faire face et de rebondir.

 

La Vallée d’Auzat et du Vicdessos a été marquée par un drame industriel et humain, en 2003, avec la fermeture soudaine de l’usine d’aluminium de Péchiney. La perte de nombreux emplois et des situations dramatiques pour de nombreuses familles et pour toute une vallée. Mais ses habitants et ses élus se sont battus et depuis, Auzat a pris en main son avenir pour devenir une station de Sport Nature. Et à l’image de la réussite du Marathon du Montcalm, le travail et l’abnégation paient.

 

Pendant ce Festival de la Montagne, j’ai eu la chance de voir un documentaire sur « Les frères Ravier » en présence de la réalisatrice Maryse Bergonzat. Un vibrant hommage à ces jumeaux, pionniers du pyrénéisme, plein d’envie, de projets et de rêves. Deux frères qui préparaient méticuleusement leurs nombreuses ascensions de sommets pyrénéens et qui ont réalisé des exploits, dont beaucoup sont encore méconnus. De la réussite et de la modestie. Du respect et du partage. Du courage et de l’audace. 

 

 (toutes les photos peuvent être agrandies en cliquant dessus)

 

Le plus bel itinéraire mène au cœur de soi. C’est qui me motive au quotidien. Un grand merci à toute l’équipe d’organisation, aux 350 bénévoles, aux partenaires et collectivités locales. Un grand bravo à tous les participants. Un merci tout spécial à Corinne et à Marc, pour tout ce que vous avez fait et tout ce que vous souhaitez faire avec France Skyrunning.

 

Le site du Marathon du Montcalm - Station Sports Nature

Le site de France Skyrunning



23/08/2011
9 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Ces blogs de Nature pourraient vous intéresser