EIGER-NORDWAND : l'Ogre en Tricounis et Corde de chanvre

À l'été 2002, deux excellents alpinistes ont refait l’ascension de la Face Nord de l’Eiger (Oberland, Alpes, Suisse) avec le matériel de l’époque. Des chaussures cloutées et des cordes de chanvre. Stephan Siegrist et Michal Pitelka ont ainsi reproduit le tracé de la première datant de 1938. Ce projet fut exemplaire, car l’équipe a fait de nombreuses recherches et a travaillé avec les deux survivants de cette première. Deux années ont été nécessaires pour pouvoir mettre sur pied cette aventure exceptionnelle. Tout a été refait à l’identique. Thomas Ulrich, le réalisateur du film et concepteur du livre a dit : « Avec cette ascension, nous a voulu honorer la puissance de Heckmair et ses camarades avec un film et des photographies en noir et blanc ».

La Face Nord est un mur de 1650 m

Le livre de Thomas Ulrich est absolument magnifique. Et j’ai la grande de chance de l’avoir dans ma bibliothèque. Qui plus est, dédicacé par Stephan Siegrist lui-même. En effet, j’ai eu la possibilité de faire avec Stephan l’ascension de la Jungfrau, en juillet 2003. C’était le premier prix pour le concours photo de Montagne Magazine que j’avais remporté. Stephan Siegrist m’avait parlé avec tant d’enthousiasme de cette ascension de la Face-Nord de l’Eiger. Ce fut pour lui un moment intense de sa vie de montagnard. Il faut dire que la symbolique de l’Ogre (traduction de l'allemand « Eiger ») est énorme. C’est une des faces Nord les plus difficiles au monde. Et lorsque l’on voit le matériel de l’époque, on est encore plus subjugué par l’exploit que cela a été.

L'équipement utilisé lors de l'ascension de 1938... en 2002

L’Eiger fut également le théâtre d’un combat politique et idéologique à l’aube de la seconde guerre mondiale. En 1938, la Face Nord de l’Eiger est vaincue par quatre alpinistes : Heckmair, Harrer, Vörg et Kasparek. Heckmair a réussit une fabuleuse première, mais il n’entend pas qu’elle soit récupérée par le régime Nazi. Esprit libre et indomptable, Anderl Heckmair a voué sa vie à son unique passion : la montagne. Ses mémoires (« Alpiniste ») furent éditées par Michel Guérin. Encore un très bel ouvrage à avoir chez soi. « Une autobiographie qui communique le bonheur de grimper et prouve qu'on peut être un héros et le refuser ». La montagne nous enseigne de nombreuses choses. Il suffit de l’écouter (et de s’écouter). L’expérience se nourrit d’erreurs.